De 1821 à 2017, 375 Rosières se sont mariées à La Mothe Saint Héray Charles Benjamin Chameau et son testament

image001Le 23 avril 1749 naît à La Mothe Charles Benjamin Chameau, quatrième fils de Pierre Chameau, sieur des Ortioux, marchand de draps et de soie.La famille Chameau, selon Jules Richard, est honorablement citée dès le XIVème siècle dans quelques vieilles chartes du château de La Mothe. C’est donc une des familles bourgeoises les plus anciennes du pays. C’est aussi l’une des plus aisées.

Charles Benjamin Chameau, très lié avec le vicomte de Carmoisin, fils du seigneur de La Mothe, part à Poitiers terminer ses études et y faire son droit puis, il rejoint son ami à Paris.
Il devient avocat au parlement de Paris et se fait rapidement une bonne clientèle. Assez versatile politiquement, il fait preuve par ailleurs d’un fond inépuisable d’obligeance. Spéculant en bourse, il est assez heureux pour amasser une belle fortune qu’il perd dans la banqueroute qui précède la révolution. Se raidissant contre la mauvaise fortune, il redouble d’ardeur au travail et, en 10 ans, se refait une très honnête aisance.
Le 7 août 1811, il perd son frère, Pierre Thomas Chameau, chanoine de la cathédrale de Poitiers et, entre autre, chapelain de la chapelle de Château Tison desservie par le château de La Mothe. Charles Benjamin compte en hériter mais, son frère l’a déshérité au profit de ses deux nièces. Profondément affecté, il dicte quelques années plus tard un testament par lequel il déshérite lui-même celles qu’il accuse de l’avoir dépouillé et dote son pays natal auquel il est resté profondément attaché. Pour mieux accentuer son ressentiment, il fait à chacun de leurs trois enfants don de 100 francs de rente viagère, rente qui est encore servie par l’administration des Rosières à la dernière survivante jusqu’à la fin du XIXème siècle.

C’est donc non à un pur élan de générosité mais, tout au moins partiellement, à l’assouvissement d’une rancune que La Mothe doit sa grande fête locale mais, comme l’écrit H. Caillon dans son étude Charles Benjamin Chameau et les Rosières de La Mothe Saint-Héray en 1891 : « Les ombres au tableau ne l’empêcheront pas de rester, entre tous, le premier et le plus grand bienfaiteur de La Mothe ».
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Il dictera son testament le lundi 15 janvier 1816 à Maître Viénot, notaire royal. Il décèdera le 10 décembre 1816 à l’âge de 67 ans. Cinq années seront nécessaires à l’organisation de l’établissement des Rosières.

Le testament : le règlement de l’établissement des Rosières

Règlement
Sur l’établissement de Bienfaisance institué par feu Mr Charles Benjamin Chameau ayant pour objet le mariage annuel de trois jeunes filles dans la commune de La Mothe St Heraye, département des Deux-Sèvres.
Article premier – Conformément au testament notarié de
Mr Charles Benjamin Chameau du 15 janvier 1816 et à l’ordonnance du Roi du 7 août 1817, il sera marié tous les ans et à perpétuité dans la commune de La Mothe St Héraye, Département des Deux-Sèvres, trois rosières qui seront dotées le jour de leur mariage par l’établissement de bienfaisance dont il sera ci-après parlé.
Article 2 – Ces rosières seront choisies dans la classe la plus indigente et parmi les jeunes filles qui seront reconnues avoir, depuis leur première Communion, donné le plus de preuves, par leurs actions, de l’accomplissement de leurs devoirs envers Dieu, la patrie et le souverain, leurs parents et l’humanité et qui seront sages et laborieuses.
Article 3 – Ces mariages seront célébrés à l’église par Mr le curé de la paroisse avec ceux qu’elles auront choisies de l’agrément de leurs parents et avec l’approbation des administrateurs de l’établissement.
Article 4 – L’époque de leur célébration fixée au second lundi de juillet de chaque année.
Article 5 – Le jour de la cérémonie les trois jeunes mariées seront vêtues de blanc, la tête ornée d’une rose blanche naturelle ou artificielle, elles seront conduites à l’Eglise par le maire avec leurs futurs et leurs parents pour y recevoir la bénédiction nuptiale.
Article 6 – Chaque rosière recevra en dot le jour de son mariage le tiers des revenus net des biens fonds et arrérages de rentes dont l’établissement est et sera propriétaire, en vertu du testament du dit sieur Chameau et de l’ordonnance royale précitée.
Article 7 – Cette dot, qui s’élèvera pour chacune à la somme de six cents francs au moins, leur sera payée par le trésorier du bureau sur le mandat des administrateurs.
Article 8 – S’il arrivait qu’on ne trouva pas suffisamment de filles ayant les qualités requises dans la commune, les administrateurs et les dames pourront en choisir dans le canton.

La Maison des Rosièresimage006
L’actuelle maison des Rosières, que les touristes peuvent admirer, n’est pas le bâtiment d’origine dont Charles Benjamin Chameau a fait don à sa commune natale.
L’immeuble d’origine, loué depuis 1816 a été réparé à plusieurs reprises. Mais, ce n’était que des réparations partielles et le bâtiment demandait à être totalement restauré. Après l’échec de plusieurs projets de restauration, la nouvelle maison des Rosières est solennellement inaugurée le deuxième lundi de septembre 1888. En 1891, on y place le buste de Charles Benjamin Chameau, œuvre du sculpteur Métivier, d’après la miniature donnée à l’établissement par la famille Chameau. Sous le balcon, une plaque de marbre, conformément au vœu du testateur, porte le nom de l’établissement.
La Fête des Rosières
De 1821 à 2009, 370 Rosières ont été couronnées, 365 sont inscrites au registre des mariages de La Mothe St Héray. En revanche, toutes les Rosières sans exception se sont mariées religieusement à l’église de La Mothe. Ce sont donc les registres paroissiaux qui font foi en la matière.

L’établissement de bienfaisance organisé selon les volontés de Benjamin Chameau et la municipalité de La Mothe St Héray dès l’origine, s’ingénient à conserver la tradition tout en recherchant la variété des animations afin, chaque année, de soutenir l’intérêt des visiteurs.
C’est ainsi qu’au fil des ans, on peut relever, une course d’ânes, le lancement d’un ballon monté… Au début du siècle, « c’est pour tous », écrit le docteur Prouhet « l’occasion de réjouissances multiples et variées, concerts, mâts de cocagne, banquets, illuminations… pendant trois jours, la ville est en liesse. »
image009Pour les familles de La Mothe et particulièrement la jeunesse, ce sont trois journées, où l’on s’en donne à cœur joie. Il y a la retraite aux flambeaux, les lanternes vénitiennes, les feux de joie, les chevaux de bois. Le deuxième jour, c’est le mariage en grandes pompes avec la venue de personnages importants puis, la cavalcade. Et, le troisième, la balade au Fouilloux avec ses stands de pâtisseries du pays et la bataille de confettis. Les trois soirs, il y a bal mais, celui du lundi est plus spécifiquement « le bal des Rosières » et il est gratuit.

Mais, jusqu’à la veille de la guerre 39-45, le clou du programme est la représentation du Théâtre Populaire Poitevin. En 1897, en effet le docteur Corneille fonde et inaugure dans le cadre naturel et rustique du théâtre de verdure du parc de La Mothe, une nouvelle mode d’art théâtral avec sa troupe, qu’il crée, et pour laquelle il compose tout un répertoire spécial dont la partie musicale a pour compositeur attitré Louis Giraudias, notaire à La Mothe.
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Pendant plusieurs années, selon le testament, le mariage était organisé le second lundi de juillet. En 1832, les cérémonies furent reportées au deuxième lundi de septembre. Ce n’est que depuis 1972, que la fête se déroule le premier samedi de septembre.

Depuis 1972, les festivités s’étalent du vendredi soir au dimanche et comprennent de nombreuses attractions foraines sur la place Clémenceau.

Le vendredi soir, retraite aux flambeaux et feu d’artifices ont longtemps été suivis d’un bal populaire, remplacé par un concert organisé et destiné à la jeunesse Mothaise et des alentours ces dernières années.

Le samedi, c’est « le mariage de la Rosière ». Le cortège est depuis de nombreuses années précédé par l’Harmonie de Lezay et encadré par de jeunes Mothais en costumes traditionnels ; les jeunes filles portant, comme la Rosière, cette coiffe bien spécifique de notre pays que le docteur Corneille appelle le « caillon » et dont la création ne date que de la fin des années 1880.
Partant de la Maison des Rosières où l’élue du jour se voit passer autour du cou le médaillon de Charles Benjamin Chameau, le cortège se rend à la mairie pour le mariage civil. Puis, au bras de monsieur le maire, la Rosière se dirige vers l’église au son d’une des deux Marches des Rosières, l’une écrite par Louis Giraudias et l’autre par monsieur Picard, vétérinaire, toutes deux bien avant la guerre et jouées par la fanfare municipale.
Après la cérémonie religieuse, le cortège retourne à la Maison des Rosières, au balcon de laquelle, après lui avoir remis la dot, le maire présente la mariée aux Mothais et à tout le peuple rassemblé pour la circonstance. Le « rosier » rejoint alors sa Rosière sur le balcon et échange, avec elle, en public, son premier baiser d’époux.
La soirée se termine par un dîner dansant. Même si les mariés fêtent ensuite leurs noces dans l’intimité de leurs proches, ils viennent ouvrir officiellement le bal populaire organisé en leur honneur.

Le dimanche matin a lieu une course, pendant longtemps cycliste, actuellement pédestre. L’après-midi, la cavalcade rassemblant des chars réalisés par des représentants de différentes communes du canton, des membres d’associations locales, des habitants de la commune… clôturent les festivités, qui se poursuivaient encore il y quelques années par un spectacle folklorique et une représentation théâtrale.

La fête des Rosières est donc la grande fête locale qui attire la foule des visiteurs et replonge les Mothais dans les racines de leur passé où les belles filles de La Mothe, ces « arlésiennes de l’Ouest » étaient remarquables dans leurs robes chamarrées, avec leurs coiffes très particulières qui faisaient jadis écrire à Auguste Gaud :

« Avec sa coiffe blanche aux frissonnantes ailes
Et son teint de brugnon vermeil et velouté
La Mothaise est la fleur de grâce et de beauté
Dont le brillant éclat fait pâlir les plus belles. »
LaissezVousConterLesRosieresEn savoir plus surles prémices, l’histoire de la fête, la Maison des Rosières, la Fête et ses évolutions, la théâtre populaire poitevin Livret en vente à la mairie : « Laissez-vous conter les Rosières », par le Pays d’art et d’histoire                 En vidéo par Web TV Tourisme   Devenir Rosière à La Mothe St Héray au XXIe siècle ?
La fête des Rosières aujourd’hui

    De 1821 à 1914, il y a régulièrement trois rosières chaque année. Les périodes de guerre correspondent souvent à des années sans Rosière. Après la Seconde Guerre Mondiale, il y a parfois deux Rosières, le plus souvent une seule. Ces dernières années, il devient régulièrement difficile de trouver des volontaires.
    Pourtant, la manifestation, tout en cherchant à conserver les traditions, évolue également. Aujourd’hui le programme s’adresse aux plus jeunes à travers le concert, aux Mothais, fiers de leur particularité avec le mariage, aux associations avec les défilés de chars, et de plus en plus, la fête tend à se faire connaître au-delà des limites régionales, grâce au Centre National des Villes Rosières de France.

    Le couple, qui s’engage aujourd’hui à se marier selon cette tradition, est certain d’avoir un mariage original, plus simple à organiser car guidé par le Comité des Rosières et le Comité des Fêtes, avec des avantages financiers non négligeables…

Le maintien de la tradition : procédures et récompenses
    Au cours des temps, cette tradition apporte aux jeunes ménages démarrant dans la vie une aide qui reste appréciable. En 1821, la dot de 700 francs correspond à peu près au salaire annuel d’un ouvrier. Par ailleurs, les jeunes époux assistent évidemment gratuitement aux diverses manifestations données en leur honneur. Au début du XXe siècle, leur repas au banquet des Rosières leur est offert ainsi qu’à douze de leurs invités.
    En 1987, la dot était de 6500 francs à laquelle s’ajoutaient 2500 francs du Comité des Fêtes tandis que le Crédit Agricole ouvrait un compte au jeune ménage et lui offrait un voyage. Le Crédit Mutuel de son côté ouvrait également un compte et le maire et ses adjoints offraient un réfrigérateur, cependant qu’une collecte organisée par les forains rapportait 1000 francs.
    En 1994, la dot s’élevait à 9000 francs, le don du Comité des Fêtes à 2500 francs ; le Crédit Agricole offrait un voyage de huit jours et le Crédit Mutuel ouvrait un compte, tandis que le maire et les adjoints continuaient à offrir un appareil électroménager.
    Depuis le début du XXIème siècle et le passage à l’euro, la dot s’élève à 2000 euros, à laquelle s’ajoute 500 euros du Comité des Fêtes et toujours un cadeau du maire et de ses adjoints.

Toutes les candidatures sont désormais étudiées, et les adaptation du protocole modulables. Le document téléchargeable rappelle les avantages de ce mariage pour les futurs candidats.

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